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Le futur de la Belgique est digital

Thierry Geerts, Director Google Belgium
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Thierry Geerts

Une quinzaine de personnalités ont été invitées à publier, entre janvier 2018 et juin 2019, une Carte blanche sur le site web du CIRB : l’opportunité, pour chacune d’entre elles, de partager sa vision pour la Région bruxelloise de demain, et d’exprimer ses souhaits pour l’ICT régional.

Deux entreprises de taxis anversoises annoncent qu’elles ont équipé 40 de leurs véhicules de tablettes. Les passagers de ces taxis peuvent ainsi consulter certains sites internet, ainsi que la météo ou le cours de la Bourse, et chercher un hôtel ou un restaurant dans les environs. Ainsi, la tablette va améliorer la vie du chauffeur, celle du passager et celle de la société de taxis. Il est même question de proposer une application qui permettra de suivre le parcours effectué par le taxi. « Les sociétés de taxis ont trouvé le chemin vers les autoroutes de l’information », titre même la Presse.

Cet article aurait très bien pu être daté de 2010, l’année où Apple a commercialisé son iPad auprès du grand public. Eh bien, détrompez-vous : l’information est parue ce 11 août 2017, à une époque où les innovations digitales d’Uber, Waze ou même Taxi.eu sont déjà bien implantées, aussi à Bruxelles. Une question me vient donc à l’esprit : pourquoi les entreprises belges évoluent-elles aussi lentement lorsqu’il s’agit d’exploiter les avantages technologiques apportés par la révolution numérique ?

Un accès à plus d’informations que George W. Bush

Aujourd’hui, Internet connecte 3 milliards de personnes entre elles. En 2020, ce chiffre atteindra 5 milliards. Tout ce petit monde sera connecté au travers d’au moins 50 milliards d’appareils. Jamais, dans l’histoire de l’humanité, nous n’avons pu aussi facilement entrer en contact avec nos semblables. Il s’agit d’une expérience mondiale vraiment inédite qui a également un impact énorme sur notre société. L’accès au web garantit un accès à l’information, à l’éducation, aux informations médicales et à la culture. Toute personne disposant d’un smartphone peut accéder à davantage d’informations que n’aurait pu en avoir le Président des Etats-Unis, il y a une dizaine d’années.
 
Tous nos modèles sociaux ont été pensés à l’ère de la précédente révolution industrielle. Ils ne sont plus adaptés à la société actuelle et sont devenus inefficaces, alors que la 4e révolution industrielle, la révolution numérique, est en marche. Celle-ci va toucher l’industrie alimentaire, l’enseignement, les soins de santé, la culture, les modèles commerciaux et les structures politiques. 

Comment l’enthousiasme pour le digital peut mener au bonheur et à la croissance économique

Il y a un siècle, la Belgique était l’un des fers de lance de la révolution industrielle. C’est, d’ailleurs, sur celle-ci que s’est construite notre prospérité. Ce n’est cependant pas en Europe que la révolution digitale connaît son essor le plus grand. Les Etats-Unis et l’Asie ont pris de l’avance. Il est donc temps de reprendre l’initiative. Dans les années 50, nous étions encore convaincus que le monde pouvait être réinventé. Lors de l’Exposition universelle de Bruxelles (l’Expo 58), la Belgique était même le centre du monde. C’est aussi pour cela que notre pays a connu une énorme croissance dans les années 60. La Flandre fit de même dans les années 80, avec « Flanders Technology », avec pour résultat des industries très performantes et innovantes, et quelques perles comme Telenet ou IMEC. Aujourd’hui, nous avons à nouveau besoin d’une approche aussi ambitieuse.
 
La numérisation offre des opportunités phénoménales à la Belgique, à ses entreprises et à ses citoyens. Nous démarrons d’une position très forte et pouvons regarder chaque opportunité digitale avec confiance et optimisme : nous bénéficions des capitaux, d’une main-d’œuvre bien formée et d’une bonne connaissance des langues, et nous avons acquis un savoir-faire colossal. Le moment est venu d’agir, car le train est déjà parti. Et si vous pensiez que tout va trop vite, dites-vous bien que le rythme d’aujourd’hui n’est encore rien comparé à celui de demain…

Syndrome typiquement belge

Nous sommes devant le plus grand des défis : il nous faut repenser le monde sur base des nouvelles possibilités que nous offre la technologie. Le plus souvent, nous nous arrêtons aux questions qui se rapportent à la révolution numérique. C’est un syndrome typiquement belge : combien cela va-t-il coûter, comment vais-je expliquer tout ça, qu’en est-il de la sécurité… ? Avant de nous y mettre, nous voulons avoir des réponses à toutes nos questions. Hélas, nous n’avons pas le temps de chercher à connaître toutes les réponses. Nous vivons dans un monde d’apprentissage par l’expérience. Un monde où si l’on tombe, il faut directement se relever : c'est le monde du launch and iterate. Des modèles qui sont ceux des entreprises technologiques américaines et asiatiques qui ont réussi. Si la Belgique ne suit pas, nous finirons emportés alors que nous pouvons encore réfléchir et prendre en main notre propre avenir numérique, selon nos règles et nos valeurs.
 
Nous devons aspirer à devenir un leader qui embrasse les opportunités offertes par la révolution numérique. Notre futur est digital et pour rester devant, il nous faut rapidement investir dans les compétences digitales. Les conditions sont, par ailleurs, réunies pour y arriver : un énorme réservoir de compétences, un internet très développé et beaucoup d’argent sur les comptes d’épargne.
 
En 2016, dans son rapport « Digitizing Belgium », le Boston Consulting Group avait estimé que 300.000 emplois nets pourraient être créés en Belgique à l’horizon 2020 si nous étions capables d’embrasser pleinement la digitalisation. Et l’on ne parle pas ici uniquement des jobs typiquement numériques dans les start-ups. La numérisation rend toute l’économie plus efficace et plus compétitive. Des emplois peuvent ainsi être créés dans une série de secteurs. Il est donc important de former aujourd’hui les travailleurs au numérique. Notre système éducatif doit pouvoir offrir urgemment des formations adaptées, de l’école primaire à la formation continue pour adulte.
Mais il est peut-être trop tard ? Avons-nous raté cette opportunité ? Absolument pas, car nous ne sommes encore qu’au début de cette révolution, qui est aussi une évolution. Ce n’est que l’aube d’internet : il n’est donc pas trop tard pour prendre le train en marche. Les entreprises peuvent déjà prendre des mesures simples, comme être visibles en ligne et sur mobile, et pouvoir atteindre 3 milliards de consommateurs qui ne sont qu’à un clic de souris des entreprises belges. Chaque PME belge peut en effet accéder, à peu de frais, à une incroyable capacité de calcul et de sauvegarde, de même qu’à l’intelligence artificielle. Emboîtons donc le pas à la révolution numérique, ou mieux encore : menons-la. Avec clairvoyance et enthousiasme.

Thierry Geerts, Country Director en Belgique pour Google